de Riccardo Petrella et autres
Une opinion d'Agathe Smyth, responsable plaidoyer pour Justice et Paix, et des membres de la coalition "eau" (*).
Que d'eau ! Que d'eau ! Sur notre planète bleue…
Mais quelle eau ? Pour qui ? A quel moment ? Sous quelles conditions ? Ce sont là des questions vitales pour l'avenir de l'humanité.
La catastrophe sanitaire due au coronavirus est au cœur des préoccupations d'aujourd'hui. La crise climatique qui a déjà commencé aura également des conséquences planétaires catastrophiques pour les plus fragiles des habitants de le Terre. Dans le cadre des leçons à tirer de ce qui se passe et de ce qui se prépare, il est aussi essentiel d’assurer notre sécurité collective, mise gravement en danger par la raréfaction croissante de l’eau, indispensable à toute forme de vie. C'est ce qui nous nous amène à proposer la création d’un Conseil citoyen de sécurité de l’eau à tous les niveaux : local, régional, national, continental, mais aussi mondial.
Explications
L’Organisation des Nations Unies estime que sans changement de cap, d’ici 2030 la planète sera confrontée à une pénurie d'eau de 40%. Cela se fait d’ailleurs déjà ressentir aujourd’hui. La sécheresse ne touche plus seulement les régions connues pour manquer d’eau, mais aussi la Belgique (notamment la Flandre), la France, l’Italie du Nord, l’Allemagne… Pourtant, nous poursuivons la prédation de la ressource eau sans limite ni conscience.
A titre d’exemple, l’une des plus grandes mines de charbon à ciel ouvert au monde, El Cerrejon, en Colombie, consomme à elle seule 34 millions de litres d’eau par jour pour une activité nuisible à l’environnement. Ce chiffre est d'autant plus impressionnant si on le compare aux 452 millions de litres d’eau nécessaires chaque jour pour toutes les activités confondues (boisson, hygiène, santé, alimentation, logement, activités industrielles, services, etc.) de la Wallonie (qui compte 3,8 millions de personnes).
Aussi, continue-t-on à nous faire croire que la croissance de l’économie numérique est l’une des conditions du développement de l'économie circulaire et du nouveau Pacte vert pour l’Europe. Or, les empreintes carbone et hydrique de l’industrie numérique sont extrêmement élevées et pourraient doubler d’ici 2030.
Le politique
Depuis quelques années, le monde du business place l’insécurité hydrique et ses effets parmi les cinq défis mondiaux majeurs des années à venir. Mais si la pénurie d’eau semble inévitable, les décideurs politiques paraissent ne se préoccuper que de la sécurité de l'approvisionnement en eau pour l’économie. En effet, si l’eau manque, que vont devenir les grandes multinationales telles que Coca-Cola, Nestlé, Danone, Unilever, Solvay, Arcelor-Mittal, BASF, les sports d’hiver, les pâtes Barilla, l’industrie du ciment, la production de micro-circuits, la production d’énergie hydroélectrique... ?
Jusqu'il y a peu, l’eau était considérée comme une ressource abondante, et les autorités et acteurs économiques ne semblaient manifester aucune inquiétude face aux milliards de personnes n’ayant pas accès à l’eau potable et aux services hygiéniques (notamment des sanitaires), comme c’est pourtant encore le cas aujourd’hui pour respectivement 2,1 et 4,2 milliards d’êtres humains.
De notre côté, nous nous inquiétons de voir la sécurité hydrique devenir l’objet d’une réappropriation dans l’intérêt, d’une part, des groupes économiques et financiers (au nom de « la sécurité pour l’économie ») et, d’autre part, par les États les plus puissants pour des raisons géopolitiques (au nom de "la sécurité dite nationale").
Vers de nouvelles "guerres pour l'eau" ?
Si tel devait être le cas, le monde serait probablement confronté à de nouvelles "guerres pour l’eau", beaucoup plus dévastatrices que celles que l’on a connues au cours des siècles passés. Devons-nous nous y préparer ?
Nous préférons plutôt affirmer une exigence légitime : une véritable culture et une politique de la sécurité hydrique doit viser la sécurité collective, intégrant une vision et une finalité de vie digne pour tous les habitants de la Terre.
Nous pensons en effet que les "guerres de l’eau" sont absolument évitables. L’humanité et les autres espèces vivantes n’ont pas besoin de conflits pour cette ressource, mais bien de nouvelles règles, de dirigeants qui entendent bâtir un monde différent, moins violent et qui évite le délabrement en cours.
Comment identifier et structurer les éléments et les stratégies apportant davantage de sécurité hydrique pour tous, aussi bien à l’échelle locale que mondiale ? Comment faire en sorte que cet autre devenir ne soit pas confisqué par des experts, mais soit l’œuvre des habitants de la Terre, de leurs capacités et utopies ? Pour qui et avec qui travailler ? Comment parvenir, autour de l'eau, à faire naître et consolider des espaces publics de réflexion et d’action "politiques" réellement ouverts, participatifs, au-delà des propositions dites "réalistes", "possibles" car conformes aux codes dominants ?
C'est pour répondre à ces questions essentielles que nous lançons cet appel à la mobilisation sans frontières en faveur de la sécurité hydrique pour tous. Ne laissons pas la prédation de l’eau au nom des intérêts des plus forts emporter la destinée de la Terre. La justice hydrique pour tous les habitants de la Terre nécessite d’urgence un grand acte de courage politique mondial : la mise en sécurité planétaire de la première "res publica" mondiale qu’est l’eau pour la vie. Rejoignez-nous !
Pour tout contact : evanpoel@hotmail.com (Groupe de travail écorésilience d’Etopia).
(*) Les membres de la coalition "eau":
Construire un Déclin
Patrick Dupriez, Président d’ETOPIA
La Commission Justice et Paix
Le mouvement politique des objecteurs de croissance
Les Amis de la Terre Belgique
Riccardo Petrella, Agora des Habitants de la Terre
POUR écrire la liberté
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